Popper : Les théories scientifiques sont-elles objectives ?

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Le thème de cette conférence sera ce que j’ai l’habitude d’appeler, faute d’un meilleur nom, « le troisième monde ». Pour expliquer cette expression, je ferai observer que, sans prendre trop au sérieux les mots «monde» ou «univers», nous sommes en droit de distinguer les trois mondes ou univers suivants : premièrement, le monde des objets physiques ou des états physiques ; deuxièmement, le monde des états de conscience, ou des états mentaux, ou peut-être des dispositions comportementales à l’action ; et troisièmement, le monde des contenus objectifs de pensée, qui est surtout le monde de la pensée scientifique, de la pensée poétique et des oeuvres d’art. (…) Continuer la lecture

Martin : La science peut-elle échapper à toute influence culturelle ?

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En tant qu’anthropologue, je suis intriguée par la possibilité que la culture façonne la manière dont les chercheurs en biologie décrivent leurs découvertes sur la nature. Si c’était le cas, au lycée, en cours de biologie, nous recevrions bien plus qu’un enseignement sur la nature, mais aussi sur les croyances et pratiques culturelles, comme si elles étaient inscrites dans la nature. Au cours de mes recherches, j’ai réalisé que l’image de l’ovule et du spermatozoïde, celle que l’on retrouve aussi bien dans la culture populaire que dans les théories scientifiques sur la reproduction biologique, repose sur des stéréotypes qui sont au centre de nos définitions culturelles du masculin et du féminin. Ces stéréotypes impliquent non seulement que les processus biologiques féminins ont moins de valeur que leurs équivalents masculins, mais aussi que les femmes ont moins de valeur que les hommes. Mon but en écrivant cet article est notamment de mettre en lumière les stéréotypes de genre qui se cachent dans le vocabulaire scientifique de la biologie. Ainsi exposés en pleine lumière, j’espère qu’ils perdront une grande partie de leur pouvoir de nuisance. Continuer la lecture

Lahire : Le scientifique doit-il comprendre ou juger ?

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Au fond, la perspective propre aux sciences sociales pourrait être condensée                dans la devise que prête le romancier Georges Simenon au commissaire Maigret. Cette devise, qui est aussi celle du romancier qui se fait interprète des histoires individuelles et de leurs crises, est la suivante : « Comprendre et ne pas juger. »  Continuer la lecture

Feyerabend : La science est-elle supérieure aux autres connaissances ?

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L’idée que la science peut, et doit être organisée selon des règles fixes et universelles est à la fois utopique et pernicieuse. Elle est utopique, car elle implique une conception trop simple des aptitudes de l’homme et des circonstances qui encouragent, ou causent, leur développement. Et elle est pernicieuse en ce que la tentative d’imposer de telles règles ne peut manquer de n’augmenter nos qualifications professionnelles qu’aux dépens de notre humanité. En outre, une telle idée est préjudiciable à la science, car elle néglige les conditions physiques et historiques complexes qui influencent en réalité le changement scientifique. (…) Toutes les méthodologies ont leurs limites, et la seule “règle” qui survit, c’est : « Tout est bon. » (…) Continuer la lecture

Becker : Le scientifique peut-il prendre parti ?

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Avoir des valeurs ou ne pas avoir de valeurs : la question nous poursuit, quand les sociologues entreprennent d’étudier des problèmes en lien avec le monde dans lequel ils vivent, ils se sentent pris dans des tirs croisés. On les pousse à ne pas prendre parti, à être neutre et à faire une recherche techniquement correcte et exempte de valeurs. D’autres leur disent que leur travail est superficiel et inutile s’il n’exprime pas un profond engagement. 

Ce dilemme, apparemment si difficile pour tant de gens, n’existe en fait pas, il est imaginaire. Pour qu’il existe, on devrait supposer, comme certains le font, qu’il est possible de faire de la recherche non contaminée par des sympathies personnelles et politiques. Je propose de démontrer que cela n’est pas possible et, de ce fait, que la question n’est pas de savoir si nous devrions prendre parti, étant donné que nous le ferons inévitablement, mais plutôt de savoir de quel côté nous sommes. (…)  Continuer la lecture