Saint-Albine : Le comédien doit-il croire à son illusion ?

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Gena ROWLANDS dans Opening Night (1978) de John CASSAVETES

Les acteurs tragiques veulent-ils nous faire illusion ? Ils doivent se la faire à eux-mêmes. Il faut qu’ils s’imaginent être, qu’ils soient effectivement ce qu’ils représentent, et qu’un heureux délire leur persuade que ce sont eux qui sont trahis, persécutés. Il faut que cette erreur passe de leur esprit à leur cœur, et qu’en plusieurs occasions un malheur feint leur arrache des larmes véritables.

Rémond de Saint-Albine, Le Comédien (1747), II, I, 3

Radford : Comment pouvons-nous être émus par une fiction ?

Supposons que nous lisions un récit des terribles souffrances éprouvées par un groupe de personnes. Si nous avons un peu d’humanité, nous serons vraisemblablement émus par notre lecture. Le récit va probablement éveiller ou réveiller des sentiments de colère, d’horreur, de consternation ou de violence et, si nous avons des âmes sensibles, nous pouvons fort bien être émus jusqu’aux larmes. Nous pouvons même éprouver de la peine.
Supposons maintenant que nous découvrions que ce récit est faux. S’il a été la cause de notre peine, nous ne pouvons pas continuer à l’éprouver. Alors même que le récit a fait son effet, si l’on nous dit qu’il est faux, et que nous en venons à le penser faux, pleurer devient impossible, à moins qu’il ne s’agisse de larmes de rage. Si nous n’apprenons qu’après coup la fausseté du récit, nous nous sentirons bernés, dupés, d’avoir été ainsi émus jusqu’aux larmes. (…)

Disons qu’un de nos amis, un acteur, nous invite à le voir simuler la douleur extrême, l’agonie. Il se tord de douleur et gémit. Si nous savons que ce n’est qu’un jeu, pouvons-nous être émus jusqu’aux larmes ? Sûrement pas. Nous pouvons certes être embarrassés, (…) mais tant que nous sommes convaincus que ce n’est qu’un jeu, qu’il ne souffre pas réellement, ses souffrances ne peuvent pas nous émouvoir ; il semble invraisemblable et même inintelligible que nous puissions être émus jusqu’aux larmes par sa représentation de l’agonie. La seule chose que nous semblons pouvoir faire est peut-être d’applaudir cette mise en scène si elle est réaliste ou convaincante et, à défaut, la critiquer.

RADFORD, “Comment pouvons-nous être émus par le destin d’Anna Karénine ?” (1975)

Suis-je le mieux placé pour savoir qui je suis ?

MAGRITTE, La reproduction interdite (Portrait d’Edward James), 1937 Huile sur toile, 79 x 65,5 cm Rotterdam, Museum Boymans-van Beuningen

(1) La reproduction interdite…

a) Quelle est la fonction naturelle du miroir ?

b) Expliquez le titre de l’œuvre : La reproduction interdite. D’où émane l’interdiction ?

c) Imaginez une explication rationnelle pour rendre compte du phénomène observé.

d) En quoi Edward James est-il essentiellement différent des autres objets présents autour de lui dans la scène ? Qu’est-ce qui justifie cette différence de traitement ?

(2) …(Portrait d’Edward James)

a) Qu’est-ce qu’un « portrait » ?

b) Quelle partie du corps d’Edward James voyons-nous ?

Qu’a de particulier cette partie du corps ?

c) A qui Edward James ressemble-t-il ? Qui est représenté en réalité ?

d) Au total, combien de personnes sont actuellement en train de contempler ce qui se trouve devant elles ?

Que contemple chacune d’entre elles ?

(3) Interprétation d’ensemble

a) Imaginez une explication symbolique pour rendre compte de ce phénomène. (Qu’a voulu dire Magritte ?)

b) En quoi ce tableau retranscrit-il d’une certaine manière l’expérience ordinaire du miroir ?

c) En quoi s’agit-il effectivement d’un « portrait » ?

d) Ré-expliquez le titre de l’œuvre.

Rencontre avec une romancière : Mélanie Fazi

— dans le cadre de la réflexion sur “créer” —

Le lundi 9 mars 2015, les élèves de Terminale L du lycée René Cassin (Arpajon) ont pu échanger avec la romancière Mélanie Fazi à propos de son oeuvre fantastique et autour des questions du métier d’écrivain et de traductrice, de la création artistique et de l’écriture.

Quelques extraits de la rencontre, avec l’aimable autorisation de l’auteure :

Mélanie Fazi est une romancière française qui a notamment publié plusieurs dizaines de nouvelles fantastiques et travaille également en tant que traductrice de divers auteurs anglo-saxons.

La rencontre en classe était centrée sur la question de la création sous tous ses aspects, depuis les symboles utilisés dans l’écriture fantastique au quotidien du métier d’écrivain et de traductrice.

Voici les idées que les élèves ont gardées de cette rencontre :

Et pour finir, voici les messages écrits par les élèves eux-mêmes pour faire part de leur ressenti à la suite de cette rencontre :
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