Rousseau : La société idéale peut-elle concilier sécurité et liberté ?

Cette difficulté ramenée à mon sujet peut s’énoncer en ces termes :

« Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui-même et reste aussi libre qu’auparavant. » Tel est le problème fondamental dont le contrat social donne la solution.

Les clauses de ce contrat sont tellement déterminées par la nature de l’acte que la moindre modification les rendrait vaines et de nul effet ; en sorte que, bien qu’elles n’aient peut-être jamais été formellement énoncées, elles sont partout les mêmes, partout tacitement admises et reconnues ; jusqu’à ce que, le pacte social étant violé, chacun rentre alors dans ses premiers droits  et reprenne sa liberté naturelle, en perdant la liberté conventionnelle pour laquelle il y renonça.

Ces clauses bien entendues se réduisent toutes à une seule, savoir l’aliénation totale  de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté. Car, premièrement, chacun se donnant tout entier, la condition est égale pour tous, et la condition étant égale pour tous,  nul n’a intérêt de la rendre onéreuse aux autres.

De plus, l’aliénation se faisant sans réserve, l’union est aussi parfaite qu’elle ne peut l’être et nul associé n’a plus rien à réclamer : car s’il restait quelques droits aux particuliers, comme il n’y aurait aucun supérieur commun qui pût prononcer entre eux et le public, chacun étant en quelque point son propre juge prétendrait bientôt l’être en tous, l’état de nature subsisterait et l’association deviendrait nécessairement tyrannique ou vaine.

Enfin chacun se donnant à tous ne se donne à personne, et comme il n’y a pas un associé sur lequel on n’acquière le même droit qu’on lui cède sur soi, on gagne l’équivalent de tout ce qu’on perd, et plus de force pour conserver ce qu’on a.

Si donc on écarte du pacte social ce qui n’est pas de son essence, on trouvera qu’il se réduit aux termes suivants : Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale ; et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout.

ROUSSEAU, Du Contrat social (1762), I, chapitre 6 “Du pacte social”, §§4-9

Questions :

  1. A quel dilemme s’expose la société idéale ? Expliquez ce qui est incompatible.

  2. Que suppose Rousseau à propos du contrat social dans le 2e paragraphe ? Justifiez.

  3. Analysez l’expression « l’aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté ». Pourquoi cette « aliénation » est-elle légitime ?

  4. Reformulez les 3 avantages du contrat social selon Rousseau.

Une explication orale proposée par Tatyana et Marine (TL, 2017)

Une autre explication orale proposée par Loane, Lauryn, Manon et Eve (TL, 2018)

2 réflexions sur « Rousseau : La société idéale peut-elle concilier sécurité et liberté ? »

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